Le 31 août 2011, alors qu’il se rend sur son lieu de travail à motocyclette, un jeune homme perd le contrôle de son véhicule en dépassant un tracteur qui procède au fauchage du bas-côté de la route. L’accident survient à hauteur du tracteur.
Le cyclomotoriste est projeté à terre puis tombe dans le fossé. Compte tenu de l’importance du choc, il ne garde aucun souvenir des causes lui ayant fait perdre le contrôle de son véhicule.
La victime assigne le département (le tracteur appartenait au Conseil général) et son assureur en réparation de ses préjudices.
L’arrêt de la Cour d’appel de Poitiers du 17 février 2016 la déboute de sa demande d’indemnisation : la victime doit démontrer que le véhicule, avec lequel il n’y a eu aucun contact, a eu un comportement perturbateur.
La victime de l’accident de la route se pourvoit en cassation et reproche à l’arrêt d’avoir dit que le tracteur n’était pas impliqué au sens de l’article 1er de la loi du 5 juillet 1985 et de l’avoir débouté de ses demandes.
Par arrêt de la 2ème Chambre civile du 2 mars 2017 n°16-15.562, la Haute juridiction statue en faveur de la victime car elle casse cette décision.
La notion d’implication d’un véhicule donne lieu à de nombreuses interprétations jurisprudentielles, parfois contradictoires, car elle n’est pas définie par la loi.
L’esprit de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation est pourtant d’éviter toute discussion sur la causalité.
Selon l’article 1 :
«Les dispositions du présent chapitre s'appliquent, même lorsqu'elles sont transportées en vertu d'un contrat, aux victimes d'un accident de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur ainsi que ses remorques ou semi-remorques, à l'exception des chemins de fer et des tramways circulant sur des voies qui leur sont propres. »
Monsieur Robert Badinter, à l’origine de cette loi, avait expliqué devant les parlementaires :
« S’agissant du terme impliqué, il est volontairement très large. C’est le fait qu’un véhicule terrestre à moteur soit intervenu, à quelque titre que ce soit, qui détermine l’application des règles contenues dans le texte (...). On ne devrait donc pas avoir à discuter du rôle causal ou non, actif ou passif, du véhicule pour déterminer son existence. »
Cette décision respecte l’esprit de la loi, favorable à l’indemnisation des victimes.
Elle est à rapprocher d’une autre décision de la 2eme chambre civile de la Cour de cassation du 15 janvier 2015 (n°13-27.448) qui reconnait également l’implication d’un véhicule dans un accident en l’absence de contact entre les véhicules:
« Attendu que pour débouter les consorts X... et la société Z de leurs demandes, l’arrêt énonce que la seule présence du véhicule conduit par M. Y..., en l’absence de contact et de fait perturbateur de la circulation dont il serait à l’origine, ne permet pas de caractériser son implication dans l’accident ;
Qu’en statuant ainsi, la cour d’appel, qui a subordonné l’implication du véhicule de M. Y... à un fait perturbateur de la circulation, a violé le texte susvisé(…).