Lors d’un accident de la circulation survenu le 28 mars 2004, la passagère d’une motocyclette est blessée et son compagnon décède. Elle assigne l’assurance du conducteur du side-car, responsable de la collision, en indemnisation de ses préjudices.
La Cour d’appel d’Aix - en - Provence, dans un arrêt du 25 septembre 2013, rejette sa demande en indemnisation du préjudice professionnel : « l’expert ne retient aucune inaptitude à la reprise par Mme X... de son activité professionnelle en relation de causalité avec l’accident ». Si elle reconnait que « l’expert a pris soin de solliciter l’avis d’un sapiteur psychiatre, qui relève, à l’examen, un état de stress post-traumatique associé à un état dépressif majeur, dont il indique qu’il est en lien certain et direct avec l’accident » Elle en déduit que « l’état dépressif est en relation avec le décès de son compagnon (…) »et que « son inaptitude professionnelle est en relation avec son état dépressif. »
Le sapiteur psychiatre, sollicité par l’expert médical, s’était appuyé sur l’état antérieur de la victime indirecte qui avait souffert de dépression entre 1998 et 2002 pour constater que si « Mme X... présente une inaptitude professionnelle en relation avec son état dépressif, lui-même consécutif non pas à l’accident, mais au décès de son amant survenu dans cet accident (…) ; s’agissant d’un préjudice essentiellement indirect, l’expert B...n’a dès lors justement retenu aucune incidence professionnelle dans les conclusions de son propre rapport ».
La 2ème chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt du 10 septembre 2015 (n° de pourvoi 14-24116) casse et annule cette décision « en ce qu’il confirme le jugement du Tribunal de grande instance (...) en sa disposition déboutant Mme X... de sa demande d’indemnisation de préjudice professionnel(…)». Elle décide « qu’en statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses propres constatations que l’état dépressif de Mme X...qui avait entraîné son inaptitude professionnelle était la conséquence de l’accident dans lequel était décédé son compagnon, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ces constatations, a violé le texte et le principe susvisés » (article 3 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, ensemble le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime).
Ainsi la Haute juridiction reconnaît le droit à la réparation intégrale pour les victimes indirectes de dommages corporels- comme elle le reconnaît pour les victimes directes- notamment d’un préjudice patrimonial : le préjudice professionnel.