La preuve d'une exposition in utero au DES et celle de l'imputabilité du dommage à cette exposition peuvent être rapportées par tout moyen : par des présomptions graves, précises et concordantes, sans qu'il puisse être exigé que les pathologies aient été exclusivement causées par cette exposition.
Une femme ayant été exposée au Distilbène in utero, victime de 9 fausses couches et ayant réalisé 2 fécondations in vitro, assigne en indemnisation et en responsabilité la société UCB Pharma - productrice du médicament Distilbène (DES).
Le Distilbène est un médicament qui contient une hormone de synthèse (œstrogène) et qui a été délivré en France entre 1948 et 1977 afin de prévenir les fausses couches et les accouchements prématurés. Certaines filles exposées in utéro à ce médicament ont développé des malformations génitales et des cancers du vagin et du col de l’utérus de forme très rare ainsi que des cancers du sein. Les garçons exposés in utéro ont également rencontré des problèmes génitaux et urinaires. D’autres effets secondaires sont également apparus comme des troubles de la fertilité ou des troubles psychiatriques. Le laboratoire UGC Pharma fut condamné en France pour la première fois par le Tribunal de grande Instance de Nanterre en 2004: il fut reconnu à la fois responsable de la défectuosité du Distilbène en tant que fabricant et coupable d’un défaut de précaution. Cette décision a été confirmée par la Cour d'appel de Versailles, dans deux arrêts rendus le 30 avril 2004. |
La Cour d’appel rejette ses demandes au motif d’une part que l’attestation rédigée par une personne très proche de la victime quelques mois avant l’assignation au fond, même confortée par une ordonnance prescrivant du Distilbène mais non nominative, ne suffit pas à constituer la preuve de l’exposition au DES. Elle estime qu’il s’agit d’un commencement de preuve et que ces éléments doivent être corroborés par d’autres indices : en ce sens, les anomalies ne peuvent être imputées avec certitude à une telle exposition.
Par arrêt du 19 juin 2019 n° 18-10380, la Haute juridiction casse cette décision:
« Qu’en statuant ainsi, alors que, s’il n’est pas établi que le DES est la seule cause possible des pathologies présentées, la preuve d’une exposition in utero à cette molécule puis celle de l’imputabilité du dommage à cette exposition peuvent être apportées par tout moyen, et notamment par des présomptions graves, précises et concordantes, sans qu’il puisse être exigé que les pathologies aient été exclusivement causées par cette exposition, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu’il y ait lieu de statuer sur la troisième branche du moyen :
CASSE ET ANNULE »