Entre décembre 1999 et novembre 2001, une femme est victime d’agressions répétées commises par son compagnon : séquestration de trois jours après enlèvement dans le coffre d’une voiture avec violence physique, le retournement d’une bombe lacrymogène contre elle…
L’agresseur est condamné pénalement.
La victime saisit une commission d’indemnisation des victimes d’infractions afin d’obtenir réparation de ses préjudices.
La Cour d’appel limite l’indemnisation de ses préjudices seulement à la décompensation occasionnée:
elle s’appuie sur l’avis de l’expert judiciaire qui indique que « le tableau clinique initial a évolué vers un tableau de pathologie psychiatrique dont la décompensation a débuté par l’apparition d’hallucinations auditives deux mois avant le procès », il relève « un état de stress traumatique intense à l’origine d’une décompensation psychotique en relation directe avec l’agression », et indique, sur les conséquences psychiatriques des agressions, que, « même si l’on ne peut affirmer avec certitude que la maladie serait survenue sans les faits, mais en tenant compte des antécédents pré-morbides (toxicomanie, manifestations dépressives et passages à l’acte suicidaire), (…) », il « ne (lui) est pas possible de retenir l’intégralité de la maladie psychotique comme imputable de manière directe et certaine aux faits de la cause », « seule (étant) à prendre en compte la décompensation occasionnée par ces faits, mais pas toute l’histoire psychiatrique depuis et à venir d’une pathologie particulièrement complexe », : (...) l’état séquellaire de la victime est imputable aux agressions subies, mais dans la limite de la décompensation occasionnée, et que ne l’est pas « l’intégralité de la maladie psychotique » ;
La Cour de cassation, par arrêt du 3 mai 2018 n° 17-14985 casse cette décision au regard du respect du principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime
« Attendu que le droit de la victime à obtenir l’indemnisation de son préjudice corporel ne saurait être réduit en raison d’une prédisposition pathologique lorsque l’affection qui en est issue n’a été provoquée ou révélée que par le fait dommageable ;
Qu’en entérinant cette conclusion et en prenant ainsi en considération une pathologie préexistante aux agressions pour limiter l’indemnisation du préjudice corporel de Mme F..., alors qu’il ne résultait pas de ses constatations que, dès avant celles-ci, les effets néfastes de cette pathologie s’étaient déjà révélés, la cour d’appel a violé le principe susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du second moyen :
CASSE ET ANNULE »
Source: Légifrance
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