Un jeune homme s’est vu administrer, entre 1998 et 1999, 3 vaccins contre l’hépatite B. En 1999, il développe les premiers symptômes d’une sclérose en plaque dont il décède en octobre 2011.
Dès 2006, il avait introduit une action en justice avec sa famille contre le laboratoire Sanofi afin d’obtenir l’indemnisation de ses préjudices qu’il imputait à l’injection des vaccins.
La Cour de Cassation a saisi la Cour de Justice européenne pour savoir comment appliquer la directive européenne de 1985 relative à responsabilité du fait des produits défectueux , applicable en l’espèce (car le vaccin était recommandé et non obligatoire) notamment en matière de preuve.
Selon cette directive: « la victime est obligée de prouver le dommage, le défaut et le lien de causalité entre le défaut et le dommage ».
L’enjeu était important au vu de la disparité des décisions en matière d’indemnisation des accidents vaccinaux, les victimes étant en proie à la décision d'admissibilité de la preuve par les juges. La Cour d’appel de Paris et celle de Versailles différaient sur la nécessité absolue d’établir des preuves scientifiques certaines et irréfutables. La 1ère y était favorable alors que la cour d’appel de Versailles ouvrait la voie à un établissement de la preuve caractérisé par un faisceau d’indices concordants.
Selon le communiqué de presse de la CJUE « Saisie d’un pourvoi contre l’arrêt de la Cour d’appel de Paris, la Cour de cassation française demande à la Cour de justice si, malgré l’absence d’un consensus scientifique et compte tenu du fait que, selon la directive de l’Union sur la responsabilité du fait des produits défectueux, il appartient à la victime de prouver le dommage, le défaut et le lien de causalité, le juge peut se baser sur des indices graves, précis et concordants pour établir le défaut d’un vaccin et le lien de causalité entre le vaccin et la maladie ».
L’arrêt est rendu le 21 juin 2017 par la CJUE :
« il ressort en substance des énonciations que comporte la décision de renvoi qu’un tel régime n’exige pas de la victime qu’elle produise, en toutes circonstances, des preuves certaines et irréfutables de l’existence du défaut du produit et de celle du lien causal entre ce dernier et le dommage encouru, mais qu’il autorise le juge, le cas échéant, à conclure qu’une telle existence est avérée en se fondant sur un faisceau d’indices dont la gravité, la précision et la concordance lui permettent de considérer, avec un degré suffisamment élevé de probabilité, qu’une telle conclusion correspond à la réalité. »
En l’occurrence, l’excellent état de santé antérieur de la victime, l’absence d’antécédents médicaux familiaux de la personne vaccinée ainsi que l’existence d’un nombre significatif de cas répertoriés de survenance de cette maladie à la suite de telles administrations peuvent, le cas échéant, constituer des indices suffisants pour établir une telle preuve
Les juges restent libre d’apprécier, même en l’absence de consensus scientifique s’il existe un lien de causalité entre l’inoculation du vaccin et le déclenchement de la maladie, ce qui n’implique pas de renversement de la charge de la preuve pour la victime qui doit communiquer un faisceau d’indices concordants, conformément au régime probatoire énoncé dans la directive européenne.